Vincent et Waudru en tête-à-tête…
Un siècle après leur rencontre, les reliquaires des saints patrons de Soignies et Mons se sont retrouvés à Casteau sous le soleil. Un événement préparé de longue date dans les deux cités.
A l'église, les premiers arrivants franchissent le porche. Ils viennent s'assurer qu'ils trouveront une place assise. C'est qu'on attend du monde pour cette célébration exceptionnelle placée sous l'égide de deux grands saints du 7e siècle. Soignies vénère Vincent, auquel est dédié le Grand Tour du lundi de Pentecôte, et de même Mons célèbre Waudru lors de la Procession du Car d'Or du dimanche de la Trinité.
Les Sonégiens sont là...
Or ces deux fêtes sont passées depuis plusieurs mois. Mais les deux cités ont choisi ce moment où l'on passe de l'été à l'automne pour organiser cette rencontre hors du commun, celle des reliquaires de leur saint patron respectif. Objectif : fêter le 100e anniversaire de la précédente rencontre. C'était en 1919 : Soignies et Mons voulaient alors remercier Dieu de les avoir épargnées lors de la « Grande Guerre ».
A quelques centaines de mètres de l'église, en bordure de la route qui relie les deux villes, il n'y a encore que quelques badauds. Mais peu à peu l'attroupement grossit. Un autocar fait halte et débarque des passagers inhabituels : des chanoinesses, des hallebardiers, des archers... Des figurants bien sûr. Par contre ces dames vêtues de blanc et de noir qui sortent de deux voitures sont de vraies religieuses.
Tout le monde patiente. C'est qu'on attend les pèlerins qui vont arriver de Mons et de Soignies. L'information se répand : les Montois arrivent dans une dizaine de minutes. On se poste au débouché d'un chemin ombragé, en contrebas de la chaussée, à l'angle d'une petite chapelle. Et puis soudain des oriflammes jaunes et noires apparaissent au loin et les chants se font entendre. Ils sont là ! A peine le temps de les accueillir et de se retourner : une marée humaine déferle de la chaussée. Les Sonégiens sont là aussi ! Avec leur chef bien sûr mais aussi leur châsse...
Faire confiance
C'est dans un joyeux brouhaha que la rencontre tant attendue se déroule enfin. Mais il faut se mettre en ordre : les reliquaires et les groupes costumés se dirigent vers l'église, réveillant la place endormie. A l'intérieur, c'est la foule des grands jours. Une partie des fidèles doit rester à l'extérieur, mais un grand écran a heureusement été disposé. Les participants s'asseyent sur l'herbe. C'est comme le pique-nique avant l'heure.
En accueillant les fidèles, l'abbé Christian Dubois, doyen de Soignies, dégage le sens de cette célébration : « Elle s'inscrit dans le sillage du synode des familles, vécu voici quelques années par notre diocèse. Vincent et Waudru étaient mariés, et le mariage nous inspire. Prions pour les familles. » Dans son homélie, Mgr Harpigny place le même thème dans une perspective historique : « Depuis le 7e siècle, le temps de Vincent et Waudru, l'engendrement a changé. Ne jugeons pas, faisons confiance, essayons de comprendre, on n'est jamais dans une impasse. »
La célébration s'achève par le cantique à sainte Waudru « Sainte Waudru, patronne de la cité, protège tes enfants bien aimés » et l'hymne à saint Vincent « Ô Madelgaire, ni le sang, ni la noblesse... »
(Vidéo réalisée par Sonostradamus)
Une procession « mixte »
On retraverse les rues du village pour se retrouver sur la route. D'autres groupes costumés viennent s'ajouter, la procession peut commencer, au son de la Royale Fanfare de Casteau-Thieusies. La chaussée de Bruxelles est bien remplie. Le cortège mêle « Vincentiens » et « Waldetrudiens ». Ainsi c'est Soignies qui a délégué sa « famille de sainte Waudru » mais Mons a envoyé son Grand Bailli et sa Dame Bâtonnière. Voici les chanoines de Saint-Vincent, avec leurs capes écarlates bordées d'hermine blanche, précédant les Chanoinesses de Sainte-Waudru, avec leur touche de vert tranchant sur le blanc et le noir de leurs riches atours.
Arrivent enfin les deux vedettes de la procession : le Chef de saint Vincent, escorté par ses « Compagnons picquenaires » d'Horrues et ses archers de Soignies, et le Chef de sainte Waudru, précédé des hallebardiers montois. Mais en fin de cortège, des chants religieux se font entendre : c'est la châsse de saint Vincent qui ferme la marche. Les courageux porteurs affrontent les derniers raidillons de la chaussée.
Pour la paix
A une encâblure du but, tout le monde s'immobilise pour une cérémonie émouvante. Les nombreux drapeaux des associations patriotiques font la haie, aux côtés des représentants communaux des deux villes. La bourgmestre de Soignies dépose une gerbe au monument qui rappelle qu'ici même, en août 1914, les Britanniques tirèrent leur premier coup de feu. Puis la première échevine de Mons fait de même au mémorial qui, de l'autre côté de la chaussée, évoque les Canadiens qui se trouvaient ici le 11 novembre 1918. Un rappel significatif du contexte de la rencontre de 1919.
Plus que quelques dizaines de mètres : cette fois, ce sont les mouvements de jeunesse qui font la haie pour l'entrée dans le parc du château Goffinet. La baronne avait promis d'accueillir les participants à cette journée commémorative. Elle est décédée voici quelque temps mais ses héritiers ont tenu parole. Les pelouses du château sont envahies par une cohorte joyeuse de Sonégiens et de Montois, heureux de se restaurer. On s'était dit : « Rendez-vous dans cent ans »...
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Créé parDiocese de Tournai